Réseau des collectivités Territoriales pour une Économie Solidaire

Entretien avec Marie-Meunier Polge
Publié le 7 mars 2017 - mis à jour le 5 février 2019

« Au quotidien, je constate que les bonnes idées viennent des territoires et non plus d’en haut » : Entretien avec Marie Meunier-Polge

Suite des entretiens avec les nouvelles administratrices du RTES, avec ce mois-ci : Marie Meunier-Polge, conseillère déléguée à l'ESS au Conseil régional d'Occitanie. Elle revient pour nous sur ses chantiers actuels en matière d'ESS et sur le contexte de la fusion en Occitanie. Un entretien qui est aussi l’occasion de connaître son parcours et ses attentes vis-à-vis du RTES.

Pouvez-vous revenir pour nous sur votre parcours d'élue régionale ?

Je suis conseillère régionale déléguée à l'ESS depuis 2004, initialement en Languedoc-Roussillon. Cette période correspondait à la création de plusieurs délégations à l'ESS dans différents Conseils régionaux mais aussi au niveau infra-régional. Les acteurs de l'ESS étaient déjà bien présents dans les territoires, mais cette période a marqué le début d'un portage politique de l'ESS au niveau territorial. Ce portage politique a été très bien accueilli par les acteurs locaux. Nous avons porté avec eux le premier schéma régional de développement économique en 2005 qui incluait déjà l'ESS, ainsi que les Rencontres régionales de l'ESS. Et aujourd'hui encore nous continuons à co-construire nos politiques avec les acteurs de l'ESS.

Quels sont vos chantiers actuels pour la nouvelle région Occitanie ?

Nous mobilisons 8 millions d'euros au budget 2017 pour l'ESS et surtout nous voulons qu'elle irrigue toute l'économie. C'est un message qui est aussi porté par la présidente de région, Carole Delga, qui en tant qu'ancienne Secrétaire d'État à l'ESS est logiquement très attentive au développement de l'ESS.

Nous venons d'adopter le 2 février dernier notre SRDEII, mais aussi les schémas de la formation professionnelle, dans lesquels l'ESS est très présente. Nous nous sommes d'ailleurs beaucoup appuyé sur les nombreuses contributions des acteurs de l'ESS lors de la quinzaine de réunions territoriales d'élaboration du SRDEII.

Un des besoins qui est remonté de cette concertation concernait justement la reprise d’entreprise en SCOP, dans le contexte de nombreux départs en retraite de dirigeants, avec des attentes en terme de formation des nouveaux gérants et en matière de fonds propres. C'est ce qui nous amène à bâtir actuellement, en lien avec la Caisse des Dépôts et l'URSCOP, le futur fonds pour la reprise d’entreprise par les salariés et le développement des coopératives, qui sera mis en œuvre avant l’été 2017.

Nous souhaitons également mettre en place de nouveaux dispositifs d’aides aux entreprises d'ici l'été 2017. Notre logique est de soutenir des entrepreneurs dont les projets correspondent aux besoins des territoires. Nous ne sommes plus dans un développement exogène où on attendrait des entreprises venues d'ailleurs qui s'installeraient massivement. Aujourd'hui, nous sommes à l'écoute de porteurs de projets locaux très stimulants qui défendent des valeurs. C'est vraiment vivifiant, surtout en comparaison avec le contexte politique national des plus moroses.

Au delà de ces nouveaux dispositifs, la Région actionne déjà de nombreux leviers, comme le Fonds d’innovation sociale (FISO) ou la pépinière Réalis, ce pôle d'innovation sociale qui accompagne au démarrage et au développement de l'activité une cinquantaine d'entreprises, par le biais d' hébergement, d'accompagnement personnalisé et collectif et par la mise à disposition de services mutualisés et d'espaces communs. Le bâtiment Réalis, basé à Montpellier et qui a bénéficié de fonds européens, est éco-conçu et son architecture vise à faciliter les rencontres et les collaborations entre les entreprises hébergées.

Le Conseil régional continue également son appui aux incubateurs Alter’Incub et Catalis, aux PTCE comme Le Périscope à Ramonville ou Les Ateliers à Castres, ou encore au salon d'affaires socialement responsables Coventis. Ce salon est né après plusieurs éditions des Rencontres régionales de l'ESS débutées en 2005. Nous souhaitions passer à la vitesse supérieure avec cet évènement biennal qui augmente la visibilité des entreprises de l’ESS. Il était jusqu'à présent organisé au Corum (Palais des Congrès de Montpellier).

Nous allons également poursuivre le concours « coup de pouce » ou encore la YESS Académie, qui rassemble sur deux jours des porteurs de projets et étudiants pour booster l'innovation sociale.

Enfin, nous poursuivrons notre soutien aux têtes de réseaux, ou aux fusions d'outils tels que la SCIC de capital-risque « Initiatives pour une Économie Solidaire ».

Comment vivez-vous la fusion entre le Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénnées ?

C'est un chantier compliqué qui demandera du temps car nous avons des cultures différentes mais cela se fait progressivement.

En Midi-Pyrénées, l'ESS était davantage inscrite dans le cadre des politiques de développement durable, tandis qu'en Languedoc-Roussillon, c'était directement dans le champ du développement économique. Il y a donc de la complémentarité entre ces deux territoires différents.

La CRESS Occitanie est née en décembre 2016 et elle vient d'organiser avec le Conseil régional la première Conférence territoriale de l'ESS à Toulouse, qui a réuni plus de 360 personnes.

Quelles sont vos attentes vis-à-vis du RTES ?

Au quotidien, je constate que les bonnes idées viennent des territoires et non plus d'en haut. Je constate aussi qu'au niveau territorial, on arrive à travailler au-delà des divergences politiques en construisant ensemble des expériences concrètes, dans le respect de valeurs communes.

J'attends justement du RTES qu'il mette en lumière ces expériences et ces bonnes idées qui se construisent dans les territoires, notamment dans le cadre de sa lettre électronique. Et je souhaite aussi que l'on continue les journées d'échanges entre élus, sur nos politiques et surtout sur la manière dont nous les mettons en œuvre, car la diffusion des outils techniques est un enjeu majeur de réussite de nos politiques.