Réseau des collectivités Territoriales pour une Économie Solidaire

Publié le 15 février 2014

BPI et PIA, les outils financiers en faveur de l’ESS

Le 30 janvier 2014, Paul-François Fournier, directeur de l’Innovation de Bpifrance, a dévoilé les nouveaux dispositifs de la banque publique en faveur de l’innovation. 2014 sera la dernière année du PIA/ESS et la 1ère année opérationnelle de la BPI. Retour sur les points forts de l’intervention de la Banque Publique et sur les outils financiers pour l’ESS.

Bpifrance s'est engagée à consacrer 500 millions d'euros en faveur de l'ESS via plusieurs outils financiers : un prêt participatif social et solidaire, un fonds de fonds, une garantie associative, un fonds coopératif et un fonds d’innovation sociale. Le Programme d'Investissements d'Avenir a également un volet ESS.

2014, dernière année du PIA/ESS

À fin 2013, près de 350 structures de l’ESS ont bénéficié d’un engagement du PIA pour un montant de 63,2 millions d’euros : -au plan régional, 17,6 millions mais 9,3 millions d’euros engagés, -au plan national, 45,7 millions d’euros engagés mais 24,6 millions versés.

Le rythme d’engagement du PIA s’est accéléré en 2013 grâce au premier appel à projets sectoriel national réservé à l’auto-construction et l’habitat participatif, la santé et les services sociaux, la mobilité durable et le numérique. 10 projets sur 30 dossiers ont été financés pour un montant global de 19,6 millions.

Exemples d’entreprises de l’ESS retenues dans le cadre de l’appel à projet sectoriel
- Habitat coopératif, auto construction et réhabilitation : 3 colonnes (Rhône-Alpes) : rachat de logements en viager avec maintien des personnes âgées à domicile et offre de services ; la Manufacture Innove (IDF) : développement d’un modèle économique qui permet l’accession à la propriété d’un logement écologique pour des familles à revenus moyens ; Habitat Solidaire (IDF) : développement d’une activité d’auto-construction adossée à un concept architectural breveté - Santé et services sociaux : Groupe SOS, création de deux EHPAD à Mons-Saint-Martin et Villerupt (Meurthe-et-Moselle) - Numérique : Equanum (IDF), plateforme web orientée vers les circuits courts et la mise en relation commerciale et sociale entre producteurs agricoles et consommateurs.

En 2014, il reste environ 30 millions d’euros à engager, dont une partie importante dans le nouvel appel à projets thématique, lancé le 24 décembre 2013 qui porte sur les circuits courts, l’économie circulaire et l’insertion des personnes éloignées de l’emploi. Les modalités financières n’ont pas été modifiées, à l’exception du seuil d’intervention du PIA abaissé de 500 KE à 400 KE. Il s’agit de prêt participatif ne pouvant pas dépasser 15 ans, avec un différé d’amortissement de 3 ans maximum, et une rémunération basée sur un taux fixe égal au taux de l’OAT de la maturité du prêt et une part variable adossée à la variation positive annuelle du chiffre d’affaires (sauf pour les structures associatives). Les dossiers doivent être déposés sur le site avant le 16 mai 2014.

2014, première année opérationnelle de la banque publique d’investissement

Après le rapport de la mission de préfiguration remis en juillet 2012, 2013 a été l'année de la mise en place de la banque publique d’investissement tant au plan national qu’au plan des régions. En ce qui concerne l’ESS, Nicolas Dufourc, directeur de Bpifrance a remis le 31 mai 2013 un rapport sur les outils nécessaires au financement des entreprises de l’ESS. En juillet, sous l’égide des ministres en charge de l’économie et des finances, de l’ESS, une série d’outils financiers étaient présentés aux acteurs de l’ESS. Durant tout le second semestre de l’année 2013, les comités régionaux d’orientation de la banque publique d’investissements se sont réunis. Ceux de la région Corse et des quatre régions d’outre mer devaient se mettre en place dans le premier trimestre 2014. Ces comités comprennent des représentants de l’Etat, des régions, les partenaires sociaux et quatre personnalités qualifiées. Seule une région, la Lorraine, a désigné des élus comme personnalités qualifiées ; toutes les autres ont désigné des représentants du monde économique. Les directeurs régionaux de la BPI, souvent venus d’OSEO, sont en relation avec tous les acteurs de l’ESS qui en font la demande. L’interlocuteur unique, au niveau territorial, est le conseil régional qui, de par la loi, est chargé du développement économique.

Quelle doctrine BPI sur l’ESS ?

La BPI en tant qu’opérateur de la stratégie de l’Etat et des régions n’a pas capacité à mobiliser les autres acteurs territoriaux de l’ESS. Il est donc conseillé à ces acteurs de se manifester dans le processus de mise en place régionale de la BPI. En ce moment, se construit la doctrine ESS de la BPI, au vu des discussions éventuelles au sein des comités régionaux d’orientation mais aussi au vu des sollicitations des acteurs. Le positionnement de la BPI qui doit rechercher la valorisation de son expertise, la fluidité des décisions d’engagement et une exposition aux risques, en fonction de la nature des fonds engagés, n’est pas aisé. Il est de plus compliqué, dans le domaine de l’ESS, par le double opérateur, la CDC, maison mère de la BPI également opérateur d’outils financiers de l’ESS (comme le volet ESS du PIA).

Quels outils financiers BPI pour l’ESS ?

En 2014, la mise en place des outils financiers gérés par la BPI au profit de l’ESS devrait être effective, avec l’idée qu’à terme ces outils spécifiques pourront être réintégrés dans le droit commun. Ces outils ont fait l’objet d’une présentation en réunion plénière du Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire en janvier. La BPI est conduite à gérer deux types d’outils financiers : - ceux sous financement public comme le fonds d’innovation sociale alimenté par l’Etat et les Régions. - ceux sous fonds propres.

-Les outils financiers de la BPI sous financement public

  • Les fonds d’innovation sociale Les travaux avec les 9 régions volontaires pour mettre en place un fonds d’innovation sociale, de manière expérimentale, progressent. Des annonces seront faites dans le premier trimestre de l’année. Il est acquis que la sélection des projets se fera au niveau régional, que l’intervention principale aura lieu sous forme d’avance remboursable selon une procédure qui n’est pas encore totalement définie. Les travaux de la région Picardie et de l’Institut Godin ont été amplement utilisés pour définir quelques concepts. La BPI est surtout attentive à ce que son intervention soit cohérente d’une région à l’autre même si elle admet que chaque région présente des spécificités et donc traite de l’innovation sociale de manière différente. Cette intervention se fera aussi en fonction de la doctrine exposée le 30 janvier dans le Plan NOVA, refonte du financement de l’innovation, basée sur 3 axes : Simplicité, Accompagnement, Continuum de financement.

-Les outils financiers, sous fonds propres de la BPI, sont en cours de finalisation.

  • Le prêt participatif social et solidaire aura pour but de financer des structures de l’ESS avec des montants de 10 000 à 50 000 € remboursables à moyen terme (7 ans). Son but n’est pas de financer la totalité du besoin de financement d’une entreprise, mais de s’ajouter à d’autres financements. Il permet aux entreprises de l’ESS de renforcer leurs fonds, de financer leurs investissements ou de prévenir des problèmes de trésorerie récurrents ou d’y répondre. Les interlocuteurs des entreprises, habilités à délivrer ce prêt sont les réseaux habituels des opérateurs financiers et les fonds d’investissement solidaires de l'ESS tels que France Active, IDES, France Initiative … qui peuvent prescrire des dossiers à la banque. Ils interviennent en co-financement et uniquement sur une partie du besoin financier de la structure.
  • Le fonds de fonds est un fonds centré sur des entreprises à fort impact social, par exemple celles intervenant dans les quartiers difficiles. BPI France aura un rôle d’accompagnement, notamment pour identifier les acteurs susceptibles d’intervenir dans ce secteur. Ce fonds est destiné à aider les entreprises de l'ESS à forte utilité ou impact social (associations, coopératives), à leur stade de croissance et de transmission, afin de renforcer leur haut de bilan (ressources et emplois à long terme). Ils prennent la forme d'apports en fonds propres ou quasi-fonds propres d’acteurs privés du financement solidaire et de l'ESS (banques spécialisées, mutuelles) et la mobilisation des titres d'investissements classiques. À noter que le droit de reprise, conservé par le prêteur, permet aux fonds prêtés de rester durablement dans la structure.
-Dans le cadre de son plan entrepreneurs des quartiers présenté à l’un des conseils des ministres de décembre 2013, le ministre en charge de la politique de la ville a précisé les attentes vis à vis de la BPI : - Le doublement du Prêt à la Création d’Entreprise, passant de 7 000€ à 14 000€ - Une meilleure garantie aux prêts bancaires jusqu’à 70% de la somme prêtée - De nouveaux moyens donnés aux fonds d’investissement dédiés aux entreprises issues des quartiers : 10 Millions en 2014

Une expérimentation « entrepreneurs d’avenir » dès 2014 pour permettre à des jeunes sans ressource de mener leur projet de création d’entreprise, en s’appuyant sur les dispositifs de contrat aidé, la garantie jeune et les cadres d’entrepreneuriat collectif de l’économie sociale et solidaire.

  • La garantie associative BPI France, avec la CDC, apportera sa garantie aux prêts bancaires des associations qui assurent des missions de service public dans les secteurs médico-social, de l’éducation, de la formation et de la lutte contre les exclusions. Cette garantie permet de faciliter le prêt aux plus grosses associations auprès et par l'intermédiaire des banques. Grâce à l'intégration de ce nouvel outil de garantie, BPI France est en mesure de faciliter et de sécuriser l'accès au crédit bancaire, de limiter le recours aux cautions personnelles et de créer les conditions d’un partenariat durable avec un banquier. Les prêts des grosses associations ne pouvaient pas jusqu'alors être garantis par BPI France.
  • Création d’un fonds d’investissement dans les coopératives Un fonds d’investissement sera créé pour soutenir des coopératives aux stades de la croissance et de la transmission. Il réunira des acteurs tels que l’IDES, la CGSCOP et éventuellement les banques mutualistes. Un outil opérationnel dont on attend de connaître les premiers résultats quantitatifs
  • La plateforme du crowfunding de la BPI annoncée, à l'occasion des 1ères Assises du financement participatif, le 30 septembre 2013 au Ministère de l'Economie et des Finances, est désormais en ligne, TousNosProjets. Il s’agit d’un portail Internet qui fédère les 16 acteurs déjà existants en France qui ont décidé de collaborer avec cette plateforme et qui ont été labélisés par BPI France L’objectif est d’augmenter leur visibilité et de financer, notamment, l’ESS, en diffusant gratuitement les projets de ces 16 acteurs de la finance participative. TousNosProjets.fr est un moteur de recherche regroupant des projets à impact Social, Environnemental, Culturel, Economique, à financer par des internautes sous forme de Dons, de Prêts ou d’Investissement. L’internaute est entièrement responsable des sélections de projets qu’il peut faire et des contacts qu’il peut initier.

Il y a actuellement 649 projets à découvrir. La ministre en charge des PME, de l’innovation et du numérique prépare un décret qui assouplira les règles de l’appel public à l’épargne et le monopole bancaire des prêts de manière à booster cette finance participative. La finance solidaire demandait cet assouplissement depuis longtemps. Affaire à suivre…

Retrouvez l'article de Patricia Andriot sur le Comité Régional d’Orientation de la BPI du 30 janvier 2014.

Photo CC Bev Norton