Réseau des collectivités Territoriales pour une Économie Solidaire

Publié le 10 octobre 2015

CGET : table ronde sur l’entrepreneuriat dans les quartiers

Le 17 septembre, le CGET organisait une table ronde sur le thème "Comment mobiliser les acteurs du monde économique et toutes les formes d’entrepreneuriat en faveur des quartiers ?". Retours sur cette rencontre.

Animée par Thierry Du Bouetiez pour le compte du CGET, cette table ronde devait rappeler la priorité du développement économique des quartiers, inscrite dans la loi de programmation urbaine. Elle devait également souligner la nécessité d’une économie plurielle au service des besoins des habitants. Elle n’aura que partiellement réussi à atteindre ce dernier objectif. Plusieurs témoignages à la tribune ont donné le sentiment que le seul besoin de ces quartiers serait l’emploi et que seule l’entreprise au sens commercial du terme pourrait y satisfaire. Le vivre ensemble porté par les associations, le lien social porté par les autres politiques publiques pouvaient dès lors apparaître trop éloignés du propos de la tribune alors même qu’ils constituent une condition nécessaire pour l’effectivité d’une politique de développement économique. Eternel sujet sur le social à la remorque de l’économique ou le social et l’économique profondément interdépendants ! L’animateur a pris soin toutefois de parler à la fois de la mobilisation des grandes entreprises à travers la charte entreprises et quartiers signée par près de 60 grandes entreprises au niveau national et 400 entreprises au niveau local) et du développement de l’entrepreneuriat dans les quartiers. Christian Caye, en charge du développement durable au groupe Vinci a rappelé que la politique de la ville n’est pas politique des quartiers. Si le groupe a signé la charte, c’est parce que cette charte parle de développement économique des quartiers. La ville est un éco système qui concentre des flux d’où il ressort des flux. Les quartiers sont ainsi de gigantesques opportunités de développement. Mais il faut accélérer les flux et non pas rester dans une économie autarcique avec des amortisseurs sociaux qui permettent uniquement de juguler les externalités négatives. Il faut fabriquer du stock d’entrepreneurs. C’est la vision du groupe qui s’appuie sur une pratique puisque le groupe a aidé à la création d’une entreprise d’insertion. Michel Offredo, responsable du projet banlieue au sein de BNP PARIBAS a évoqué le financement du développement économique dans les quartiers. -BNP Paribas est le premier employeur privé de Seine Saint Denis. -les quartiers sont marqués par l’économie de la drogue, une économie souterraine où les petites associations sont les béquilles de l’Etat. -les banques ne prêtent pas ; BNP soutient l’Adie depuis 1993, parce qu’elle sait faire des accompagnements que les banques ne savent pas. L'Adie a un encours de microcrédits de 80 M€, dont 30 venant de BNP. Et la banque fait du bénévolat de compétence. -Impact partenaires, fonds d’investissement pour les quartiers, représente 44 millions de prêts pour des entreprises à potentialité de développement mais pas en démarrage Majid El Jarroudi, délégué général à l’agence pour la diversité entrepreneuriale évoque la relation d’affaires entre les entreprises et les TPE de quartier . -Son premier objectif est de faire bouger les services achats des grands comptes : après 6 ans d’existence, d’accompagnement d’entrepreneurs qui ont un impact positif sur le quartier, -il sollicite un fournisseur lambda et il apporte des solutions d’accompagnement pour que l’entrepreneur monte en compétence (Crearif ile de France) -il associe de grandes entreprises et souhaite mieux armer les entrepreneurs, notamment les entreprises en phase de développement (entreprises de services aux autres entreprises, plutôt que dans des commerces de proximité) -il faut travailler en bonne intelligence avec les entreprises privées. Danièle Desguées, directrice générale de la boutique de gestion de Paris évoque les réseaux de la création d’entreprise et leur complémentarité. Que faire pour les quartiers ? Les réseaux ont de nombreux porteurs de projets communs avec France active, des locaux communs et donc un énorme potentiel ; 30% ont une idée ou un projet de création d’entreprise. Mais comment ne pas oublier les porteurs de projet ? Il faut aller vers les gens par le bus il faut aller au dehors des bureaux. Victorin Gokpon, responsable de premier conseil à Sevran, entrepreneur du 93, premier conseil pour les autres entrepreneurs. Il faut d’abord des locaux de proximité bon marché. Il a personnellement en 2006, investi 300 euros et maintenant de fonds propres empruntés chez Cetelem de 10 000 euros. Avec beaucoup de volonté, il a choisi la forme entreprise . «  si je ne suis pas bon, je disparais. Le centre d’affaires de proximité est modèle très peu rentable pour des superficies au delà de 300 mètres carrés, en deça on fait du social… aujourd’hui 2 entreprises avec 80 emplois dont une emploie 60 salariés, suivi post création. » ,.. Il n’a pas obtenu de soutien public pour le Centre d’affaires du Blanc Mesnil mais une aide d’Air France dans le cadre des fonds de revitalisation. « On a fait avec nos propres moyens 5 centres d’affaires en ile de France. J’accepte de ne pas gagner de l’argent ; je demande au bailleur social de faire de même lorsqu’il investit en bas d’immeuble. » Il regrette que les fonds d’investissement n’ont pas donne un euro du fait de cette dimension sociale des centres d’affaires. Désormais, il y a 7 clubs d’entrepreneurs en Ile de France favorisant le « business local ». Il faut choisir un modèle d’entreprise et s’appuyer sur les habitants du quartier Plusieurs réactions de la salle viennent conforter le sentiment d’une dualité d’interventions : Jacques Dughéra a souligné l'importance de ne pas après avoir, après une politique de la ville qui misait beaucoup sur le lien social avec les amortisseurs sociaux, en avoir une qui ne mise désormais que sur le tout entreprise privée et le développement économique importé. Il faut raisonner socio économique. -les associations de quartier très malmenées par les pouvoirs publics y compris des collectivités locales prises à la gorge financièrement, sont la dimension citoyenne de ce lien social et économique qui est une RICHESSE. -les habitants qui ont des compétences y compris de l’expertise d’usage en matière d’économie informelle (garage solidaire de quartier , restaurant cuisine du monde, mini crèche à domicile) mais on préfère souvent aller chercher des experts extérieurs plutôt que de les accompagner et de leur redonner voix au chapitre et pouvoir. -et enfin les collectivités locales qui dans le cadre de leur schéma de développement économique et des contrats de ville peuvent ou pas faciliter cette dimension socio économique, d’ESS mais pour une activité et non pas forcément pour créer de l’emploi qui est un prisme réducteur. Il faut alors insister sur les circuits du développement économique courts mais aussi dans le domaine financier (épargne locale), pas suffisamment dans les marchés entre entreprises sauf expérience des centres d’affaires de proximité. -il s’agit d’associer tous les chefs d’orchestre : entreprises sociales, secteur de l’ESS ; on est aussi sur des missions sociales. Au niveau d’une stratégie de développement d’une agglomération, comment aller chercher les fournisseurs les plus proches plutôt que d’aller les chercher à 400 km ? D'autres interventions ont souligné: -il ne faut pas opposer la dimension sociale et l’entreprenariat : souvent l’entrepreneur fait de la RSE sans le savoir -le sujet n’est pas de faire des bénéfices mais de faire du développement économique Danièle Desguées insistera sur le repérage des porteurs de projet via Citélab et le soutien aux structures ESS ; tous les projets ont une étude de marché ; statut d’auto entrepreneur n’est qu’un statut fiscal, pas juridique : que fait-on par rapport à cette pléthore d’auto entrepreneurs? La SARL à un euro questionne également. Les difficultés supplémentaires sur le territoire urbain du fait que la plupart des entrepreneurs d’origine africaine crée dans les pays d’origine. Dans d’autres pays, on prend davantage en compte ces spécificités. Quartier ou zone de croissance ? Faut il changer les noms ?1 Intervention de la Directrice de la stratégie question du commerce dans les quartiers EPARECA. 15 ans d’expérience, établissement créé en 1996, l’EPARECA est un opérateur d’immobilier de commerce et d’artisanat, sur saisine des collectivités a défaut d’initiative privée. Le programme immobilier d’entreprise pour les artisans, en partenariat avec l’APCM est évoqué. Des conditions favorables : -ce n’est pas uniquement en créant des mètres carrés -on doit certes en créer via des espaces immobiliers adaptés mais on doit aussi anticiper la commercialisation, l’appropriation pas les habitants, la communication EPARECA a été doté de 130 millions de francs en 1998 : 50 centres commerciaux inaugurés depuis, 700 polarités commerciales ; on en a détecté 270 en difficulté avec remise a niveau voire un accompagnement public, 130 nécessitant une restructuration en profondeur. Au delà de la réponse de commerce de proximité, il y a un enjeu de lien social de proximité. On constate une évolution très forte de la grande distribution, -15% dans la dépense alimentaire, 50 % dans l’hypermarché grande distribution ; les groupes s’implantent en direct sur les quartiers mais s’adossent sur des indépendants. On recherche des futurs exploitants de commerce… EPARECA s’appuie sur les BGE pour cette connaissance Localisation ; en cœur de quartier, on ne change pas radicalement le centre commercial du quartier le choix est d’avoir un commerce en limite de quartier sur de s axes de flux. Il faut aussi anticiper en amont la manière dont sera exploité l’équipement commercial : comité de présélection des candidats : consulaires, Epareca, collectivité locale. On avait une doctrine avec un objectif restructuration de l’équipement commercial en assurant l’équilibre financier jusqu'à la vente. En réalité, 15 équipements ont été revendus, ce qui signifie qu’ils ont une rentabilité normale. Mais dans la plupart du temps, c’est plus compliqué ; les projet d’urbanisation ont pris du retard dans certains territoires, avec les risque de sécurité, l’évolution de la stratégie des groupes de distribution. C’est une question de temps, de transformation d’image. Avoir un propriétaire unique, une maitrise foncière d’ensemble, c’est souvent plus simple [13] Intervention de Géraldine Lacroix, directrice du département économie et cohésion sociale de la CDC. Les principaux outils de financement pour la mobilisation des acteurs : -investisseur de long terme -ressources au service d’un territoire -correspondants dans la mécanique des contrats de ville (ingénierie du volet deveco du contrat de ville) -citélab -soutien aux réseaux associatifs, on a à cœur avec l’Etat de favoriser des mutualisations et offres partagées lisibles -incubation -soutien aux pépites (initiative France) -PTCE / CAE activité / emploi Les points de progrès à faire ensemble : -changement d’échelle -appel à faire remonter les projets économiques -centre de ressources politique de la ville : on s’interroge sur les services d’un cite lab. La CDC est en grande difficulté d’optimiser les cites lab sur tous les territoires. Géraldine Lacroix fait une focale sur les PTCE , soutenus par les collectivités locales, par la CDC et l’Etat ; il faut a minima 3 ans pour aller vers la pérennité, pas exclusivement quartier politique de la ville, comment mobiliser le droit commun ? Intervention de Raphael le Méhauté, commissaire adjoint du CGET La loi du 21 février 2014 introduit un fil rouge, le développement économique Il remercie ceux qui ont de l’audace et prennent des risques : les élus financeurs Il encourage les porteurs de projet. Le contexte n’a jamais été aussi favorable, PIA, CDC, ANRU 2 avec un contexte juridique favorable. La signature des contrats de ville par les collectivités locales est en bonne voie. -34 % des CUCS sont signés par les départements, 84% des contrats de ville, -21% des CUCS sont signés par les régions, 75% des contrats de ville -42% des CUCS sont signés par les CAF, 43 % des contrats de ville -La CDC et les chambres consulaires ont signé 10 fois plus de contrats que dans la période précédente.

Compte-rendu réalisé par Jacques Dughéra