Lancement des Etats Généraux de l’ESS en Rhône-Alpes
Le 3 décembre, le Conseil régional de Rhône-Alpes, en partenariat avec la CRESS, a accueilli sous la neige des acteurs de l’ESS, des élus et techniciens de collectivités territoriales, et autres participants pour lancer officiellement les Etats Généraux de l’ESS.
_ Cette journée se situait en « charnière » entre la fin des Rencontres de l’Economie Solidaire du mois de novembre, et le lancement des EGESS. Elle s’articulait autour de 3 temps :
Le temps professionnel
Le matin, trois ateliers ont permis des échanges d’expériences et quelques approfondissements autour de trois thématiques :
-une promotion pour changer d’échelle
-un environnement local propice au développement de l’ESS
-un levier de démocratisation et de mutation de l’économie
Dans l’atelier « Environnement local », Christophe Chevalier, PDG du Groupe Archer à Romans a souligné que «les pratiques d’ESS permettent de redonner du sens à une politique économique. D’autant que l’Insertion par l’Activité Economique et l’ESS affirment que l’exclusion et l’insertion sont d’abord une responsabilité collective et sociétale. »
Cet atelier était une invitation à dépasser les différentes barrières que nous érigeons, et à penser en termes de coopérations : entre collectivités, entre acteurs de l’ESS, entre les deux, mais aussi avec les autres acteurs économiques du territoire. Penser coopération est un des meilleurs moyens de penser aussi des mutualisations réussies. Trop souvent, face à des difficultés internes, les acteurs espèrent s’en sortir par des mutualisations, et y sont incités par les conseillers et les collectivités. Mais la mutualisation n’a de sens que si elle dépasse la difficulté vécue pour construire un projet plus global, au service de la population.
_ Dans ces constructions, les collectivités ont une responsabilité importante pour impulser et donner un cadre aux acteurs pour qu’ils s’organisent.
Pour cela, la mission économique des collectivités doit aller bien au-delà des enjeux fonciers, immobiliers et de voirie. L’attractivité d’un territoire se mesure de plus en plus à l’ensemble des services proposés aux entreprises et à leurs salariés, pour mieux vivre l’entreprise et dans l’entreprise.
Le temps institutionnel
L’après midi, Cyril KRETZCHSMAR, conseiller régional délégué à l’ESS, et Claude ALPHANDERY, Président du Labo de l’ESS, ont ouvert officiellement les Etats généraux en Rhône-Alpes, dans la pleine salle des sessions.
Claude Alphandéry a rappelé le contexte historique, qu’il compare avec l’important travail des Etats généraux du Tiers-Etat, qui ont abouti à la naissance (sans doute non envisagée) de la République, et les riches échanges entre résistants durant la seconde guerre mondiale, qui ont contribué à la rédaction du Programme du Conseil National de la Résistance. En s’appuyant sur ces deux références, il s’agit bien de penser un véritable changement d’échelle pour l’ESS, et une démocratisation de l’économie dans sa globalité.
Deux tables rondes ont ensuite abordé de manière plus transversale les enjeux socio-économiques de l’ESS, et les enjeux en matière de gouvernance.
Pour faire connaître l’ESS aux innombrables « M et Mme Jourdain », Sylvain Bouchard de la SCOP La Péniche insiste sur 2 paramètres fondamentaux : partir de la vie des gens, et faire preuve de créativité pour s’exprimer de manière ludique. Michel Rohart, directeur de l’URSCOP suggère de développer la confrontation « positive » à travers un dialogue social réinventé.
Laure Chareyre, présidente de la CRESS, invite à formuler un propos commun, qui reprend le cœur de ce qu’est l’ESS, et qui peut ensuite se décliner avec la diversité des manières de vivre l’ESS ; ce qui rassemble les acteurs de l’ESS est plus important que la diversité des formes de mise en œuvre. Elle souligne aussi que trop souvent, « on attend tout et son contraire de l’ESS » (notamment de travailler à son autonomie financière, mais sans constituer des fonds propres), et que les élus savent la trouver en période de crise.
Pratiquement en écho, Christian Avocat, Président du Grand Roanne, et Morad Bachir Chérif, Vice-Président de La Métro de Grenoble, répondaient que la communication doit venir des acteurs eux-mêmes, de manière à éviter toute récupération ou auto-satisfaction des élus. Cyril Kretzschmar soulignait que l’ESS ne peut se développer que s’il y a un véritable projet de politique économique. Et ce d’autant plus que l’ESS fait beaucoup plus débat au sein des collectivités que l’économie libérale !
Claude Alphandéry insistait sur le fait que, par rapport au capitalisme financier, l’ESS est beaucoup plus complexe. Ne serait-ce que parce qu’elle prend en compte l’intérêt général, qui n’a pas de valeur sur le marché.
En matière de gouvernance, Danièle Demoustier, universitaire, a rappelé entre autres que beaucoup d’expériences interviennent dans l’intégration socio-économique (redéfinir des vecteurs d’intégration de réel développement solidaire, qui ne segmente pas la population).
Le développement solidaire s’alimente d’un développement socio-économique endogène de territoires attractifs, ouverts sur le monde, où se construisent des partenariats. Il n’y a pas de convergence entre toutes les formes d’entreprises, mais il doit y avoir des alliances. Elle invite alors à développer des espaces de débats conflictuels pour enrichir une nouvelle gouvernance et une co-construction des politiques publiques.
Cela faisait réagir Michel Machicoane, secrétaire général de la CPCA, qui rappelait que pour l’instant les entreprises associatives sont de loin les acteurs économiques plus contrôlées... !
Claude Alphandéry insistait sur le fait qu’une bonne gouvernance, transparente, permet d’éviter des dérives. L’échelle territoriale permet à l’ensemble des initiatives de se connaître, se reconnaître, de s’organiser, se mutualiser. Mais il reste encore beaucoup à faire, et les EGESS doivent permettre des avancées décisives dans ce sens.
Le temps festif
En clôture de ces échanges, une dizaine d’entrepreneurs d’ESS de la région se sont vus remettre les trophées de l’ESS, en partenariat avec le magazine Mag2 Lyon.
La soirée se poursuivait avec L’autre soirée, événement culturel et grand public de très grande qualité, mais fortement concurrencé par les mauvaises conditions météorologiques !!
Jean-Yves Le Turdu, association Triangles
Retrouvez ici une interview de Claude Alphandéry et des réactions de participants.
Photos cc : Scop La Péniche