Alliance Rhône-Alpes et les systèmes participatifs de garantie : l’éduc pop au service de l’agriculture paysanne
L'association Alliance Paysans Ecologistes Consommateurs se constitue en 1992 pour peser sur les réformes agro-industrielles mises en place par la PAC. Cette association est à l'origine du développement des AMAP [154] en France. Alliance PEC Rhône-Alpes, réseau régional des AMAP depuis 2004, travaille sur les Systèmes Participatifs de Garantie (SPG) depuis 2010. Entretien avec Emeline Gaborieau, animatrice technique SPG d'Alliance PEC Rhône-Alpes.
Que sont les systèmes participatifs de garantie (SPG)?
Les SPG, alors connus sous d'autres noms, ont été les premiers outils de certification de l'agriculture biologique en France dans les années 70-80. Ils sont définis par l'IFOAM [155] comme « des systèmes d’assurance qualité orientés localement. Ils certifient les producteurs sur la base d’une participation active des acteurs concernés et sont construits sur une base de confiance, de réseaux et d’échanges de connaissances». A partir des années 90, lors de la création du label AB, ils ont été partiellement délaissés pour la certification par des organismes tiers, seule reconnue par les pouvoirs publics. Mais des réseaux comme Nature et Progrès ont continué à utiliser ce système pour garantir le respect de leur cahier des charges et réclame sa reconnaissance officielle comme outil de certification de l'agriculture biologique.
Comment décidez-vous de recourir au SPG pour les AMAP ?
En 2009, dans le contexte d'une très forte croissance du nombre d'AMAP dans la région et de débats internes sur les frontières à assigner au concept, il est apparu indispensable de rappeler que l'appellation AMAP était déposée et surtout renvoyait à une charte, document de référence de toutes les AMAP. Cette charte pose un certain nombre de principes fondateurs à respecter qui se distribuent selon trois thèmes principaux : des pratiques relevant de l’agriculture paysanne (telles que définies dans la charte de l’AP), une production de qualité respectant l’environnement (notamment sans engrais ni pesticides de synthèse) [156] et le tout dans le cadre d’une économie solidaire et citoyenne. Les SPG sont alors apparus comme un outil d'accompagnement vers le respect des principes de cette charte.
Quel est alors l'objectif d'Alliance PEC Rhône-Alpes ?
L'idée n'est pas de proposer une nouvelle certification mais un outil qui permette de faire évoluer les producteurs et les groupes de consommateurs, les amapiens, vers une appropriation partagée de la charte. L'objectif est double : favoriser une plus grande transparence par les échanges, la mise en réseau et la formation des consommateurs aux enjeux agricoles ; et initier des changements de comportements chez les producteurs et les amapiens en fixant en commun des objectifs d'évolution. Les AMAP ne sont pas qu'un système de distribution, elles s'inscrivent aussi dans une démarche d'éducation populaire pour la promotion et la défense d'une agriculture paysanne et d'une consommation citoyenne et solidaire.
Comment fonctionne le SPG d'Alliance PEC Rhône-Alpes ?
Nous agissons à la fois au niveau des producteurs et des consommateurs.
Pour les paysans, la mise en œuvre du SPG passe par une visite de la ferme par un « collectif éphémère ». Celui-ci est composé d'amapiens consommateurs ou futurs consommateurs des produits du paysan visité, d'amapiens liés à un autre producteur, d'un paysan travaillant sur les mêmes productions et d'un animateur du réseau Alliance. Pour favoriser les échanges, cette visite est organisée autour d'une trame d'entretien qui aborde les 18 principes de la charte des AMAP mais aussi l'histoire de la ferme, les aspects économiques et sociaux, les relations avec le réseau AMAP,... A l'issue de la visite un contrat d'objectifs partagés est établi. Il précise les évolutions à entreprendre et les ressources techniques sur lesquelles le producteur et le groupe peuvent s'appuyer.
Et pour les consommateurs ?
Pour les amapiens, nous avons mis en place des temps de débats et d'échanges rassemblant des amapiens, des producteurs et des membres et animateurs d'Alliance. Ces débats portent sur de grands thématiques (solidarité avec les paysans, promotion d'une autre agriculture, accueil des nouveaux membres, participation de tous...) avec ce même objectif de dégager des pistes d'évolution du groupe pour une meilleure appropriation de la charte des AMAP.
Enfin une réunion sur trois du conseil d'administration d'Alliance PEC Rhône-Alpes est consacrée au bilan trimestriel des visites SPG et accueille toutes les personnes qui ont participé à des visites de ferme ou des animations. L'objectif est de travailler à l'amélioration de l'outil.
Pouvez-vous faire un premier bilan de cette démarche ?
Nous sommes à mi-parcours d'un projet expérimental de trois ans fortement soutenu par la région Rhône-Alpes. Nos premières conclusions sont positives. D’un point de vue quantitatif, une cinquantaine de visites de ferme et une dizaine de temps d'animation des amapiens ont eu lieu. Nous avons plutôt privilégié les fermes en maraîchage et en arboriculture où la demande des consommateurs est la plus forte. D’un point de vue qualitatif, le bénéfice collectif de l’outil est réel pour tous les acteurs. Le SPG permet des temps de débats de qualité entre producteurs et consom’acteurs, l'acquisition collective de nouvelles connaissances, et de renforcer l’intercompréhension et la solidarité dans le réseau. Nous poursuivons nos échanges réguliers sur les SPG avec d'autres réseaux comme Minga et Nature et Progrès.
Pour en savoir plus.
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