« Notre utopie solidaire porte ses fruits »
Questions à Michel Dinet, président du Conseil général de Meurthe-et-Moselle et vice-président de l'Assemblée des Départements de France. Depuis 2009, le Conseil général a fait évoluer sa politique de développement économique en y inscrivant les valeurs de l'économie sociale et solidaire. Tourisme, artisanat, recherche, création d'activités... tout soutien à l'économie est conditionné par une obligation d'innovation sociale et d'ancrage territorial.
Quels enjeux traversent actuellement l'ESS en Meurthe-et-Moselle ?
D’abord affirmer que l'ESS ne doit pas être considérée simplement comme une voie de garage ou une économie réparatrice. Mais plus encore, l’enjeu principal est d'éviter d'enfermer l'ESS et ses acteurs dans un secteur particulier de l'économie. Elle doit faire levier pour construire un modèle de développement plus solidaire qui ne soit pas uniquement fondé sur quelques critères de performance économique. Le soutien public doit être conduit en vue de ce changement de modèle et c'est ce que nous avons mis en place. Dans cette perspective, il y a également un enjeu fort à encourager la coopération entre les acteurs économiques qu'ils soient de l'ESS, de l'économie marchande ou de la puissance publique. Nous devons nouer des liens au service de la construction de cette nouvelle économie. Enfin, il y a un enjeu de démocratie. Une gouvernance qui soit démocratique est un défi pour l'avenir.
Quelle est votre démarche sur le territoire ?
Se préoccuper du vivre ensemble c'est construire un territoire de vie capable de construire de nouveaux projets. Le contrat territorial de développement durable (CTDD), mis en place en 2009, est un outil essentiel d’appui aux projets des acteurs locaux. Dans chacun des six territoires du département, nous avons lancé un pôle de coopération territorialisée. Ce dispositif est destiné à faire travailler ensemble les acteurs de l’insertion par l’activité économique, de l’économie sociale et solidaire et de l’économie classique autour d’un besoin du territoire, porteur potentiel de développement d’activités et d’emplois. Considérée à tort comme une utopie, nous faisons aujourd'hui la démonstration que l'ESS porte ses fruits en développant de véritables compétences économiques, sociales, politiques et civiques.
Quelles sont pour vous les actions locales emblématiques en matière d'ESS ?
Nous avons fait le pari de rapprocher jeunesse et ESS. Le dispositif « Idée Cap » est un accompagnement complémentaire au service civique. Fondé sur le soutien apporté depuis longtemps à l'éducation populaire, nous soutenons l'accompagnement des jeunes dans la conduite de leurs projets. Ainsi des associations, des coopératives ont été créées dans des domaines comme le numérique, l'architecture, la promotion du vélo en ville... et sont devenues des entreprises solides créatrices d'emplois pour les jeunes. Elles rejoignent le secteur économique de l'aide à la personne (enfance, handicap, personnes âgées...) créateur de lien social. Nous soutenons également les actions allant dans le sens d'une solidarité internationale comme le commerce équitable. Et pour resserrer toutes les mailles du filet, la restauration des collèges du département devrait être davantage approvisionnée à la rentrée 2012 en circuits courts et/ou bio.
Un véritable engagement politique de la part d'un président départemental pour l'ESS ?
Je souhaite que nous délibérions à l'automne pour orienter la politique économique sur ce champ de l'économie sociale et solidaire. Cette politique sera basée sur un renforcement des dispositifs existants, la création d'une monnaie solidaire, la diversification des partenariats pour l'aide à la création d'activités, en développant notamment les coopératives d'activités et d'emplois et les pépinières. Le soutien aux structures d’accompagnement à la création d’activité ayant un champ d’action local, il est désormais travaillé au niveau des territoires. L'ESS ne doit pas être marginalisée, la solidarité comme levier de développement concerne tout le monde.
Qu'apporte votre adhésion au RTES à votre politique locale de soutien à l'ESS ?
Le territoire d'un département ne peut faire cavalier seul dans un contexte où de grandes orientations sont à prendre au niveau national et européen, et nous devons y prendre part. Notre action en Meurthe-et-Moselle se nourrit déjà de nos échanges avec des personnalités telles que Claude Alphandéry. J'accorde une importance évidente à la mutualisation, c'est pour cette raison qu'adhérer au RTES a du sens. Tout n'est pas toujours à réinventer, il faut s'inspirer de ce que font les autres et échanger.
Je souhaiterais également y promouvoir une forme d'enthousiasme collectif basé sur trois piliers :
-un Etat respecté parce que respectable,
-dans une république décentralisée où les collectivités redevenues confiantes sont capables de prendre des initiatives de solidarité avec les personnes et avec les territoires,
-et enfin l'engagement de tous les mouvements citoyens (ESS, éducation populaire...) pour constituer le 3e pilier.
Pour en savoir plus :
Conseil général de Meurthe-et-Moselle
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