Compte-rendu du webinaire RTES & France urbaine : Collectivités, tout ce que vous voulez savoir sur les SCIC

Dans le cadre de leur partenariat autour de l’ESS, France urbaine et le RTES ont co-organisé un webinaire d'information le 24 octobre 2024, autour de la thématique : “Sociétés Coopératives d'Intérêt Collectif (SCIC) et collectivités territoriales”.
De plus en plus de collectivités s'intéressent à la Société Coopérative d'Intérêt Collectif (SCIC). Ce webinaire avait pour but de répondre à celles et ceux qui souhaitaient découvrir, approfondir et partager leurs expériences sur le statut de SCIC, appelé sans aucun doute à se développer dans les années à venir. Une SCIC permet en effet aux collectivités de s'impliquer dans un projet, ancré localement, qui répond à des besoins du territoire, aux côtés d'autres acteurs publics, privés, et de citoyen.ne.s.
Principes généraux des SCIC et rôle de la CGSCOP
Isabelle Amauger, déléguée à la vie coopérative et à la recherche à la Confédération générale des SCOP et des SCIC
La CGSCOP compte aujourd’hui environ 3000 SCOP et 1500 SCIC, soit 84 294 emplois et 9,4 milliards de chiffre d’affaires.
Le statut de SCIC est assez récent, puisqu’il date de 2001. Souvent ancrées sur un territoire géographique, ce qui intéresse les collectivités locales, les SCIC sont des sociétés de personnes qui peuvent prendre différentes formes : une SCIC peut être une SARL, une SA ou une SAS. C'est une société coopérative, qui fonctionne sur le principe démocratique d'une personne une voix. Elle peut recouvrir tout un type d'activité, tant que ce dernier répond aux besoins sociaux et d'intérêt collectif. C'est une entreprise d'intérêt collectif, la seule qui permet de réunir différents types de sociétaires autour d'un objet commun et avec un caractère d'utilité sociale (la mobilité, les énergies, la transformation en produits agricoles, la constitution de filières, l'insertion, le réemploi, la formation…). Le multisociétariat concerne le domaine juridique, mais aussi la gouvernance et la vie de la coopérative. Il se traduit par un minimum de 3 catégories : des salariés (ou producteurs, artisans, agriculteurs, etc), des bénéficiaires, et des partenaires, parmi lesquels les collectivités territoriales. Le capital, variable, est ainsi constitué par l'ensemble des parts apportées par les coopérateurs. Comparé à d'autres modes d'entreprise, les sociétaires sont libres d’entrer et de sortir de la SCIC.
La SCIC permet aussi la mise en réserve des excédents : une partie importante du résultat est affectée aux réserves dites “impartageables”. La pérennité de l'entreprise est assurée à travers la création d’un patrimoine collectif pour la SCIC, qui sera constitué au fur et à mesure de la vie de la coopérative.
Exemples de SCIC d’envergure nationale : Enercoop (fournisseur d'énergie renouvelable, citoyenne et solidaire), ou le Réseau Citiz (autopartage local).
La CG SCOP et SCIC a un rôle d’accompagnement (formations, outils financiers…), et de représentation et de plaidoyer auprès des pouvoirs publics, régionaux ou nationaux. L'adhésion est libre et volontaire. L'animation territoriale est une dimension importante de la CG SCOP, au travers du réseau de ses 9 Unions régionales (URSCOP et SCIC), qui accompagnent des projets coopératifs, sur les dimensions d'ordre commercial, financier ou de gouvernance.
Exemple : éthi’kdo, coopérative à but non lucratif de cartes cadeaux alternatives éco-solidaires, a bénéficié de titres participatifs émis par la CGSCOP.
Focus sur les liens possibles avec les collectivités
Benjamin Gueraud-Pinet, chargé de mission appui-conseil aux collectivités territoriales & juriste du RTES
La SCIC est une coopérative, nécessairement articulée avec une société. La SCIC est une personne morale de droit privé qui a la singularité de pouvoir associer les collectivités territoriales, puisque jusque-là, les collectivités territoriales n'avaient que 2 grandes possibilités d'association avec des formes d'entreprises : les associations et les entreprises publiques locales (sociétés d'économie mixte (SEM) et sociétés publiques locales (SPL)). En SCIC, la part des collectivités est limitée à 50% du capital social, c'est-à-dire que les collectivités sont nécessairement minoritaires. L'idée étant de garder la société civile, la participation citoyenne, comme centre de gravité, tout en ouvrant la porte aux collectivités. Une dynamique qui a pris de l’ampleur depuis une vingtaine d'années : près d'1 SCIC sur 2 compte au moins une collectivité au capital social. Et dans une majorité des cas, cette collectivité est issue du bloc communal ou intercommunal.
La SCIC peut accueillir tout type de collectivités (communes, EPCI, départements et régions...). Une SCIC peut transcender un territoire et retrouver plusieurs communes voisines en son sein (exemple des clubs de football). Le plafonnement de 50 % ne concerne pas le capital public (seulement la participation des collectivités locales), c'est-à-dire que l'État ou une autre personne publique souhaitant y participer, pourra.
Toutes les collectivités ont la possibilité de participer au sociétariat de SCIC, en s'appuyant sur une de ses compétences obligatoires ou non.
Une collectivité peut soutenir une SCIC de nombreuses façons: subventions, concession de DSP, accès au foncier, marché public.
Dans le cas où la collectivté est sociétaire de la SCIC, elle peut également intervenir en compte courant d’associés depuis Loi 3DS, mais pas en titres participatifs - hormis pour une SCIC HLM ou délégataire de service public municipal. Il faut veiller dans ce cas à ce que l’élu.e local.e représentant la collectivité à la SCIC se déporte de ces décisions, ce qui ne l’empêche pas de rendre compte de l’activité de la SCIC en conseil de la collectivité (doctrine HATVP de mai 2023).
Eric Becquart, chargé de mission ESS, emploi, formation à Lorient Agglomération
Lorient Agglomération s’est impliquée dans la SCIC Windcoop : compagnie maritime qui travaille actuellement sur l'ouverture de la première ligne commerciale vers Madagascar, avec la particularité d'un transport à voile. La livraison sera réalisée par conteneur, et non en vrac ou en palette, en essayant de tenir le principe d'1 mois de traversée, avec une livraison directe à des ports secondaires. Windcoop vient de finaliser un prototype de paquebot à voile qui permettra de charger 180 conteneurs et 1800 tonnes de marchandises. La livraison d'un premier paquebot devrait se faire au printemps 2026, avec un démarrage commercial à l'automne 2026.
Cette SCIC rassemble 1510 sociétaires aujourd’hui : chargeurs, partenaires financiers, logisticiens, particuliers et salariés. L’Agglomération est la seule collectivité impliquée. Le territoire de Lorient Agglomération est ouvert sur la mer ; la ville de Lorient a été créée en 1666 à l'initiative de Colbert pour y installer la compagnie des Indes orientales. La ville est caractérisée par des activités portuaires, de pêche, de marchandises, de transports de particuliers, de construction navale, des innovations dans le monde du nautisme (réflexions autour de la décarbonation du transport maritime, de la propulsion vélique - un gros enjeu maritime), des courses au large (fournisseur officiel de l’équipe française de la Coupe de l’America 2025)… Soutenir Windcoop, c'est participer à cette synergie autour de l'innovation, du développement économique et de la maritimité.
Lorient Agglomération a été à l'initiative du partenariat avec Windcoop, qui s’est traduit par la prise de parts à hauteur de 5000 euros, et l'apposition de la signature de l’Agglomération pour faciliter leur levée de fonds et convaincre d'autres financeurs.
- Adeline Franzetti, chargée de mission ESS, démocratie participative et politiques publiques à la Ville de Lille
La Ville de Lille met en place une politique ESS depuis plus de 20 ans. Dans le cadre de la stratégie ESS 2021-2026 de la ville (la 5ème) qui est toujours co-construite avec les partenaires du territoire, 20 priorités et 4 axes sont votés ; 1 axe traite des sociétés coopératives d'intérêt collectif, reliées à l'entrepreneuriat collectif.
La municipalité participe activement à la gouvernance des SCIC dans lesquelles elle est sociétaire. Une stratégie de participation de la Ville dans les SCIC a été formalisée afin de définir les critères pour entrer, investir, recapitaliser si nécessaire, et en sortir. Il n'y avait pas vraiment de coordination entre les élu.e.s siégeant au sein de SCIC, il a été alors décidé de la création d’un groupe de coordination composé d’élu.e.s en lien avec la compétence de la SCIC, un ou une suppléante, voire l’élu.e délégué.e à l’ESS.
Pour en savoir plus sur la stratégie de développement de l’ESS par la Ville de Lille, cliquez ici
Depuis 2007, la Ville participe à la SCIC d'autopartage à Lille Citiz, à 2 SCIC autour de la petite enfance, et plus récemment sur des projets micro-locaux, de tiers-lieu café-participatif autour de la restauration. Historiquement, la Ville avait aussi siégé dans une coopérative d'énergie solaire.
Ressources
Mon espace adhérent
Devenir adhérent