Sortie de colloque politique de la ville /ESS : quelques impressions
Le 7 octobre à Paris, le ministre en charge de la Ville a invité les acteurs de la création d’entreprise et de l’économie sociale et solidaire à se présenter aux acteurs de la politique de la ville.
Même si, de longue date, acteurs de l’ESS et de la politique de la ville se fréquentent notamment au plan local, il n’en demeure pas moins qu’au fil de l’institutionnalisation de la politique de la ville et surtout de l’accent mis sur la rénovation urbaine, une distance s’est instaurée.
_ Il est donc important que les ministres en charge de la politique de la ville et de l’ESS aient, dans une convention commune signée le 27 septembre 2013, souhaité renouer les liens en terme d’action. Les futurs contrats de ville mettent ainsi l’accent sur le développement économique urbain et l’apport qu’est susceptible d’apporter l’ESS à ce pilier. Le secrétaire général du Comité Interministériel des Villes a précisé que 5% de crédits des fonds européens seront dédiés à la politique de la ville, en lien avec les régions.
Patrice Noisette, professeur associé à l’ESSEC, a abordé la place à accorder au développement économique dans la politique de la ville, non pas sous l’angle des dispositifs comme souvent l’Etat a tendance à le faire, mais sous l’angle du management et de l’organisation territoriale des acteurs. Le contrat unique d’agglomération est une formidable avancée pour généraliser des pratiques de développement local économique et solidaire.
Après une intervention du Directeur Général de Randstadt France, Abdel Aissou, sur la question des discriminations, marque non seulement de racisme mais surtout de conformisme, Patrick Braouezec a mis en avant les réalisations de l’agglomération Plaine commune qu’il préside et ce qu’il attend de cette nouvelle politique de la ville. Il s’interroge sur la manière de concilier les différentes formes d’économie sur un territoire en soulignant l’intérêt des chartes entreprises – territoire, engagements des deux parties.
Il estime que l’agglomération Plaine Commune a été un territoire d’expérimentation sur l’ESS, mais aussi sur la culture et le lien avec les artisans. Il remarque le développement des plans interentreprises de déplacement en Seine Saint Denis, prémices d’une écologie urbaine.
Des exposés tenus sur le thème de la création d’activités, quelques éléments à retenir :
-L’expérimentation de Rennes : la première adjointe au maire de Rennes, Gaëlle Andro, a évoqué l’expérimentation d’une cellule de création d’activités rendue possible par une double coordination, celle des acteurs de l’accompagnement et la coordination des intervenants de la création d’entreprises par la Maison de l’Emploi, reconnaissant que la mise à disposition de surfaces et terrains pour ces activités est un problème non résolu.
-La panoplie des outils dédiés à la création d’entreprises de la Banque Publique d’Investissement, dans le discours de Isabelle Bebear, Directrice du Développement et de l'International Bpifrance.
-L’approche de la CDC, selon la directrice inter-régionale méditerranée, s’appuyant sur le réseau Cité Lab (qui se diversifie avec un cité lab confié à la CCI de Rennes), les plateformes d’initiatives locales, BGE, et les filiales de la CDC, comme la BPI, insistant sur le financement de projets par les banques puisque le « temps de la subvention est fini ».
-Les réalisations de Seymour Morsy, préfet délégué à l’égalité des chances de l’Essonne
-L’utilité des centres ressources politique de la ville, présenté par Emmanuelle Soumeur Mereau, directrice de Réso villes, centre de ressources de la politique de la ville en Bretagne et Pays de Loire.
-Les regrets de Sally Bennacer, dirigeante d’Art and blind, lauréate des talents des cités de n’avoir pas eu autant de bonnes fées sur le berceau il y a dix ans lorsqu’elle a créé son entreprise…
L’après midi sera consacré à la présentation de l’ESS.
Azouz Gharbi, directeur de la régie de quartier d’Aubervilliers, campe rapidement les activités d’intérêt général de la régie en faveur de populations à 86 % illettrées, regrettant que le droit de vote n’ait pas été accordé aux populations étrangères, ce qui aurait renforcé leur travail d’intégration.
Stéphane Veyer, directeur de la coopérative d’activités et d’emploi COOPANAME à Paris, présente l’action PIMENT, accompagnement de jeunes issus des quartiers populaires dans leur projet professionnel avec une dimension inter territoriale. Cette action est fondée sur un constat partagé, les jeunes n’ont jamais entendu parler de coopérative et le monde coopératif ne sait pas s’adresser à ces jeunes. L’accueil des jeunes sous forme de compagnonnage se passe pourtant très bien.
Sylvie Herr, SGAR Languedoc Roussillon, souligne l’apport du centre de ressources de la politique de la ville et le dynamisme de la CRESS LR.
François Marty, du groupe Chênelet (Pas de Calais) et Jean Luc Coopman directeur régional de la CDC Champagne-Ardenne, ont complété ces interventions liminaires, avant que Christiane Bouchart expose le point de vue de Lille Métropole sur l’articulation des deux politiques, sur la base de son expérience à Lille et en communauté urbaine.
Claude Alphandéry soulève l’absence de l’ESS dans les documents de l’Etat en cours de préparation pour la stratégie 2025.
Stéphane Keita, directeur du développement territorial et du réseau de la CDC (dont dépend le département économie sociale), a souligné l’appui de la CDC aux politiques publiques de l’Etat, et son fort soutien aux centres de ressources de la politique de la ville, à l’immobilier d’activités et à l’économie sociale et solidaire.
Dans son propos conclusif, le ministre en charge de la politique de la ville, François Lamy, souligne le peu de moyens dont il dispose en propre mais l’importance des moyens du droit commun désormais affectés à la politique de la ville par des conventions avec tous les ministères, dont celle avec le ministre en charge de l’ESS. Une fois la loi sur la nouvelle politique de la ville votée (avant la fin de l’année), il souhaite mobiliser les acteurs économiques (dont l’ESS) aux cotés des collectivités territoriales. Une convention est d’ailleurs conclue avec les chambres consulaires. Des actions sont désormais engagées pour le développement de l’entrepreneuriat au sein des quartiers. Le renforcement des infrastructures est en cours avec l’appui de la CDC, y compris par la création de plusieurs SEM qui seraient des filiales de l’ANRU. L’évolution des ZFU sera actée en décembre 2014, suite à l’évaluation en cours. L’enjeu n’est pas mince au plan financier car les ZFU représentent un coût de 400 millions d’euros par an.
Cette conférence à laquelle ont participé près de 300 personnes essentiellement acteurs de la politique de la ville a permis de poser les démarches de chaque acteur au plan national. Il reste maintenant à transformer l’essai par une meilleure articulation des politiques publiques sur le terrain.