Nouvelle donne du « paquet Almunia-Barnier »
Tel était l'intitulé de la Conférence-débat organisée le 2 février par le Collectif SSIG avec le soutien du Ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale. L'objectif était de décoder les principales avancées récentes concernant la prise en compte des spécificités des services sociaux au niveau européen. Signe de l'intérêt des collectivités et acteurs, le nombre important de demandes d'inscription qui n'ont pu être satisfaites.
La majorité des intervenants a souligné l'importance de ce paquet. Pour Jean-Michel Bloch-Lainé, président de la Commission Europe de l'Uniopss, il s'agit « d'un acte créateur de liberté pour les SSIG, après un chemin difficile ». Pour Jean Le Garrec, président d'Alliance Villes Emplois, ce paquet est « fondamental », et il était attendu.
L'importance de démultiplier les actions d'explication, d'information, voire de suivi de la mise en œuvre, a été soulignée, compte tenu de la complexité du sujet. A saluer la publication en février 2012 d'un Guide pratique sur les services sociaux d'intérêt général (SSIG), du Courrier des Maires et des élus locaux, réalisé en collaboration avec le Collectif SSIG (téléchargeable ici)
Les spécificités des services sociaux enfin reconnues par la loi européenne
Les avancées des différents textes proposés par les Commissaires européens Joaquin Almunia et Michel Barnier, adoptés par le collège des Commissaires du 20 décembre dernier, ont été présentées de façon détaillée, sur base d'exemples concrets. Parmi les motifs de satisfaction qui ont été soulignés:
- l'exemption de la notification préalable pour les SSIG, dont le champ a été précisé (soins de santé et de longue durée, la garde d'enfants, l'accès et la réinsertion sur le marché du travail, le logement social et les soins et l'inclusion vulnérable des groupes vulnérables)
- des clarifications sur les concepts et sur l’arrêt Altmark (avec notamment des précisions sur le mandat et le calcul de la compensation) (ces 2 éléments sont entrés en vigueur le 31 janvier 2012)
- le projet de Directives Marchés Publics, qui prévoit un régime spécial pour les services sociaux, et notamment:
1 - le relèvement du plafond de minimis à 500 000 euros sur 3 ans pour les SIEG
2 - la prise en compte de critères de qualité spécifiques pour le choix de prestataires de services: « Les États membres veillent à ce que les pouvoirs adjudicateurs puissent prendre en compte la nécessité d'assurer la qualité, la continuité, l'accessibilité, la disponibilité et l'exhaustivité des services, les besoins spécifiques des différentes catégories d'usagers, la participation et le renforcement de la position des usagers, ainsi que l'innovation (Art. 76 (2)) », et le rappel que « les pouvoirs publics restent libres de fournir ces services à caractère social eux-mêmes ».
3 - la possibilité de réserver des marchés publics à des acteurs employant des personnes vulnérables (possibilité réservée aujourd'hui uniquement aux structures employant des personnes en situation de handicap), et la possibilité d'introduire des conditions sociales comme critères d'attribution du marché, ces éléments étant encore en discussion à ce jour.
Des inquiétudes qui demeurent
De nombreuses difficultés ont été soulignées, au 1er rang desquels la complexité des textes, et leur interprétation différenciée, que ce soit au niveau des ministères ou des collectivités. Les problèmes posés par la généralisation des marchés publics ont été évoqués: la présidente de la FNARS a souligné que «les collectivités locales continuaient à faire des marchés publics à tour de bras ». Le représentant de la Fédération des PACTE a indiqué que la majorité de leurs activités, alors qu'elles sont reconnues SSIG, sont en train de passer en marchés publics. Le danger de cantonner les associations à n'être que des prestataires de services, et n'intervenant plus sur l'évaluation des besoins et de la mise en œuvre des réponses, a été souligné. Jean-Marie Bloch-Lainé, président de la Commission Europe de l'Uniopss, a pour sa part pointé que les associations devaient reconnaître aux collectivités locales la capacité à formuler un projet et à appréhender les besoins. Sinon, il n'y a pas de dialogue possible.
Le mandatement groupé en Champagne-Ardenne
Une illustration concrète extrêmement intéressante a été fournie par la Région Champagne-Ardenne, dans le cadre de son Réseau Public Régional de Formation Professionnelle. Aux côtés des modalités de contractualisation avec les organismes de formation sous forme de subventions (pour les formations universitaires, sportives, paramédicales…), ou de marché public article 30 (pour les actions préparatoires et de qualification à recrutement local) , la Région a mandaté de façon groupée des organismes proposant un parcours de formation complet, de la remise à niveau à la qualification, avec des prestations d’hébergement, de restauration et d’accompagnement. Parmi les raisons qui ont poussé au mandatement, la nécessaire coopération entre les organismes pour assurer cette offre de services (coopération que permet difficilement le marché public), et les obligations de service public inscrites dans le mandatement (gratuité de l'offre, continuité dans l'offre de services....). Les modes de calcul de la compensation et les obligations de services publics ont été élaborés avec les organismes, qui ont été accompagnés par la collectivité pour mettre en place une comptabilité analytique comparable. Plusieurs questions qui restent à creuser ont été débattues, concernant par exemple la prise en compte du non respect des obligations de services publics pour des raisons ne dépendant pas de l'organisme, ou la question des coûts induits par le mandatement.
Roselyne Bachelot a clôturé la journée en soulignant que l'économie sociale et solidaire est un précieux outil pour construire une Europe qui protège.
Retrouvez ci-joint le Guide pratique SSIG du Courrier des Maires
Retrouvez le reste des documents remis lors de cette conférence, ainsi que les supports de présentation sur le site du collectif SSIG