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Annonce d'un plan pour le soutien à la culture dans les territoires ruraux
Publié le 18 juillet 2024 - mis à jour le 19 juillet 2024

Annonce d'un plan pour le soutien à la culture dans les territoires ruraux

À l'issue d'une consultation lancée en janvier dans le cadre du Printemps de la ruralité, la ministre de la Culture Rachida Dati a présenté le 11 juillet un plan pour le soutien à la culture dans les territoires ruraux. A la clé, une enveloppe de 98 millions d'euros sur trois ans pour améliorer l’accès aux activités culturelles dans les campagnes. La mise en œuvre des 23 mesures annoncées reste suspendue à la formation d’un prochain gouvernement.

Lancé en janvier dernier, le Printemps de la ruralité a organisé une grande concertation sur l'offre culturelle dans les campagnes françaises. Plus de 35 000 connexions et 21 800 contributions en ligne ont été recueillies, émanant d’élus locaux (16 % des répondants, dont 50 % résidant dans des collectivités de 500 à 5000 habitants), d’associations (14 %), d’acteurs culturels (30 %) et d’habitants (40 %). En parallèle, des rencontres ont été menées par des directions régionales des affaires culturelles (DRAC) et deux missions parlementaires ont été confiées à l’Assemblée nationale et au Sénat. Ces consultations ont été synthétisées sous la forme d’une feuille de route sur quatre ans,

 « Ces contributions au débat ont souligné des points de fragilité que nous ne pouvons plus ignorer : insuffisante valorisation de l’offre culturelle existante ; décalage parfois constaté avec les attentes locales ; difficultés d’accessibilité en raison des temps et coûts de transport ; complexité dans l’accompagnement des porteurs de projets… », a indiqué Rachida Dati. 

La Ministre a par ailleurs annoncé le lancement d’un plan Culture et ruralité « pour changer de regard sur la vie culturelle en milieu rural, soutenir ses acteurs et ses lieux et créer un dialogue nouveau entre les formes culturelles urbaines et rurales ». 

Mobilité et communication 

 Dans son éditorial, la ministre rappelle que les territoires ruraux « comprennent 57 % des lieux culturels, dont 72 % des bibliothèques et 55 % des monuments historiques. »  On peut souligner également la place de l'ESS (identique en milieu rural et en milieu urbain), qui représente 74% établissements et 30% des emplois du secteur activités d’arts, spectacles et autres activités culturelles et récréatives, essentiellement des associations, mais également quelques coopératives (SCOP ou SCIC) et quelques fondations.

 La concertation a confirmé que « la présence d’activités culturelles dans les communes est une dimension très importante pour la plupart des acteurs des territoires ruraux, et notamment pour les élus et les habitants. » 

Cependant, la question de la mobilité « notamment à travers les difficultés d’accessibilité géographique, les temps de trajet trop longs pour accéder à des activités culturelles, le manque de transport en commun ou encore le coût des déplacements »  apparaît clairement comme un frein à l’accès à la culture en zone rurale. 35 % des répondants jugent que les lieux culturels sont trop éloignés.

Autre enseignement de la concertation : 49 % des sondés pensent qu’une meilleure information sur la programmation culturelle locale est nécessaire. « L’évènementiel est relayé inégalement sur notre territoire par les médias. Les nouveaux arrivants ne savent pas où chercher le “calendrier” des manifestations, des concerts… On va au cinéma pour prendre le programme… mais où voir qu’il y a un petit concert gratuit dans le petit village d’à côté ? », rapporte un élu.

Enfin, « le manque de ressources financières tant des collectivités territoriales que des lieux et des porteurs de projets est l’un des principaux freins identifiés au développement culturel local. »  « Les lourdeurs administratives »  sont dénoncées, notamment en ce qui concerne les demandes de subventions et les appels à projets. 

98 millions d’euros sur trois ans (2024-2027)

La ministre Rachida Dati estime « nécessaire de porter une ambition inédite, pour changer de regard sur la vie culturelle en milieu rural, soutenir ses acteurs et ses lieux et créer un dialogue nouveau entre les formes culturelles urbaines et rurales ». La mise en œuvre d’un plan culture et ruralité doté de 98 millions d’euros sur trois ans (2024-2027) était donc prévue, avec 18 millions d’euros investis dès cette année.

Ce plan comprend une vingtaine de mesures visant 4 grands objectifs : valoriser la culture et les initiatives locales ; soutenir les acteurs et le maillage culturels de proximité ; faciliter la mobilité des artistes, des œuvres et des publics et enfin accompagner les porteurs de projets par une ingénierie adaptée. 

Le gouvernement souhaite  « faciliter l’embauche d’artistes de manière occasionnelle par des communes, associations ou cafés, hôtels et restaurants pour accueillir des concerts et spectacles »  et lancer une expérimentation sur le Pass Culture. « Les territoires ruraux accueilleront la première expérimentation d’extension du Pass Culture à l’ensemble des catégories d’âge » , qui sera un outil de référence pour découvrir l'offre et la vie culturelles de proximité dans les territoires ruraux.

Parmi les mesures annoncées on retrouve le dispositif « Villages en fête »  qui vise à soutenir 1 000 projets de pratiques culturelles festives et collectives ancrées dans les territoires (chant choral, danses, contes, fanfares, carnavals, théâtre, parade…). Les aides pour soutenir les acteurs et le maillage culturels de proximité pourront bénéficier tant aux radios associatives qu'aux marchands de presse, aux monuments historiques publics comme privés, aux librairies – invitées à "expérimenter de nouvelles formes itinérantes" dès cette année –, aux cafés, mairies et lieux polyvalents qui organisent spectacles et concerts, qu'aux jeunes architectes désireux de s'implanter en milieu rural. Quant au soutien au maillage culturel de proximité, il pourra prendre la forme de "festivals à l'année", visant à déployer une action territoriale structurante et une programmation hors saison – avec une aide majorée en cas de cofinancement de la collectivité –, de nouveaux centres culturels installés au sein d'établissements d'enseignement agricole volontaires – dont dix dès 2024 –, mais aussi de cinquante "scènes culturelles de proximité" dans des territoires faiblement équipés.

Faire venir le public à la culture… et vice versa

Autre "point de fragilité" traité par le plan : l'accessibilité. Le plan veut « soutenir les communes ou EPCI en milieu rural dans la mise en place de solutions de mobilité autour de lieux ou activités culturels » : « Ces solutions de mobilités innovantes, durables ou solidaires peuvent être multiples : acquisition de minibus, déploiement de plateformes de covoiturages ou d’autopartages, transport à la demande… Les demandes seront à formuler auprès des préfectures de département dans le cadre de l’aide pour les mobilités durables en zone rurale. »  Il s'agit aussi de favoriser la mobilité des artistes et des œuvres vers le public, avec par exemple la volonté d'organiser une résidence d'artistes en ruralité annuelle par département, ou d'approfondir la diffusion du cinéma – par exemple via un soutien exceptionnel aux circuits itinérants –, mais aussi de déployer dans les deux années à venir un réseau de cent artothèques sur le territoire, en s'appuyant sur les artothèques existantes ainsi que sur les bibliothèques départementales, voire les fonds régionaux d'art contemporain (Frac), en accord avec les régions.

Le dernier grand axe du plan vise à accompagner les porteurs de projet par une ingénierie adaptée. souvent découragés par le parcours du combattant des demandes de subventions, ils souhaitent un accompagnement dans l’ingénierie culturelle, des mutualisations et un travail en réseau. Les domaines du patrimoine et de l'architecture sont particulièrement visés, notamment à travers l'annonce du doublement des vacations des architectes-conseils de l'État en Drac, le renforcement des effectifs des unités départementales de l'architecture et du patrimoine (Udap) dans les départements ruraux en tension ou la possibilité d'un cofinancement jusqu'à 80% de l'assistance à maîtrise d'ouvrage des communes rurales pour les travaux de restauration et d'entretien des monuments historiques. Il est encore question de généraliser les contrats départementaux Lecture avec tous les départements d'ici fin 2026 pour soutenir l'action des bibliothèques départementales au service des territoires ruraux, et de porter à 60.000 euros en moyenne par an le soutien à chaque contrat.

Des interlocuteurs dédiés pour les maires ruraux, et une aide du FONJEP

L'effort portera surtout sur une mobilisation des offres d'ingénierie de projet pour soutenir les initiatives culturelles en milieu rural, qu'il s'agisse du guichet unique porté par l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), des chefs de projet des Petites Villes de demain, qui intégreront l'accompagnement des projets culturels, ou de la désignation au sein de chaque Drac d'un interlocuteur dédié aux maires ruraux. En outre, le ministère de la Culture sensibilisera les établissements d'enseignement supérieur de son champ afin de créer des vocations de volontaires territoriaux en administration, un dispositif permettant à une collectivité rurale de recruter un jeune diplômé pour une mission de douze à dix-huit mois. Enfin, le fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) sera mobilisé pour créer une centaine de postes sur une durée de trois ans pour les associations culturelles en milieu rural.

L'ensemble de ces mesures bénéficieront d'une enveloppe globale de 98 millions d'euros sur trois ans, dont 18 millions dès cette année. La ventilation de ces sommes selon les différents fléchages n'a pas été annoncée, et la mise en œuvre des 23 mesures annoncées reste à priori suspendue à la formation d’un prochain gouvernement.

 

Pour plus d'informations sur les projets culturels des territoires ruraux:

Le site Culture et ruralité, animé par l'UFISC