Réseau des collectivités Territoriales pour une Économie Solidaire

SCIC et collectivités territoriales

Le RTES organisait une conférence en ligne sur la thématique SCIC et collectivités territoriales, le 20 octobre 2020. Quatre intervenants ont pu répondre aux questions juridiques posées par les collectivités qui souhaitent entrer au capital de  ces structures qui permettent de développer des projets économiques d’intérêt collectif sur les territoires. 

Avec :

  • Florent Chambolle, délégué régional URSCOP IDF

  • Benjamin Gueraud-Pinet, conseiller ESS & Juriste chez FINACOOP et conseiller municipal délégué à l'ESS & achats responsables de l'Ile-Saint-Denis

  • Philippe Maingault, chargé de projet agriculture-ESS, Conseil départemental du Val-de-Marne

  • Justine Maytraud, chargée d’investissement - ESS & développement local, Banque des territoires

Retrouvez la vidéo de cette conférence en ligne

 

Le RTES a renforcé son équipe salariée pour répondre aux demandes de plus en plus nombreuses de collectivités adhérentes sur des questions d'ordre juridique qui ne trouvent pas de réponses adaptées à ce jour. Retrouver dans notre article dédié les 1ères questions traitées (accessibles pour les collectivités adhérentes. Pour adhérer au RTES, cliquez ICI).

L'entrée au capital d'une SCIC : les textes de référence

La  Loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, article 19 septies, al. indique: « Les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics territoriaux peuvent détenir ensemble jusqu'à 50 % du capital de chacune des sociétés coopératives d'intérêt collectif. »

Cette disposition de la loi n'a pas encore été inscrite dans le Code général des collectivités territoriales, c'est pourquoi elle reste méconnue des services juridiques des collectivités, et il est important de faire connaître cet article (primauté de la loi sur le CGCT)

L’entrée au capital d’une SCIC au regard des compétences d'une collectivité territoriale :

Une collectivité territoriale peut entrer au capital d’une SCIC dès qu’une au moins des activités de la SCIC rentre dans le cadre d’une des compétences de la collectivité (ce dernier point relèvant du statut des collectivités et de la Loi NOTRe). 

Ainsi la SCIC n’est pas seulement un outil de l’ESS, mais bien de tous les secteurs d’activités et doit donc être en lien avec le service et la délégation appropriés : c’est aussi le rôle des élus à l’ESS que de sensibiliser leurs collègues, l’élu.e à la petite enfance par exemple, afin de monter une crèche sous forme de SCIC.

La SCIC se veut un outil de coopération et notamment entre collectivités. Il n’est donc pas rare qu’on ait sur un même territoire la région, le département, l’EPCI et la commune sociétaires, car la SCIC peut avoir différents objets très complémentaires du point de vue des compétences des collectivités. 

Il existe 1000 SCIC en 2020, dont 40% ont une collectivité locale sociétaire. De plus en plus de SCIC qui ont des activités en lien avec les compétences des collectivités locales ont une collectivité partie prenante dès le lancement de la SCIC: c’est une évolution car auparavant les collectivités entraient au sociétariat plutôt dans un deuxième temps.

Etre sociétaire d’une SCIC et contractualiser avec celle-ci :

Une collectivité peut tout à fait être sociétaire d’une SCIC et contractualiser par ailleurs avec celle-ci, que ce soit sous forme de subvention, marché public ou DSP. Dans le respect des règles permettant d’éviter les conflits d’intérêts, il n’existe aucune contre-indication. Il s’agit simplement d’éviter les conflits d’intérêt comme dans n’importe quelle situation, donc veiller à ce que la personne qui représente la collectivité au sein de la SCIC ne siège pas à la commission d’attribution d’un marché, d’une subvention, etc. Dans le cadre d’un marché public, il faut bien sûr respecter les règles de la commande publique.

La contractualisation avec une entreprise dont la collectivité est au capital est en réalité commun pour une collectivité dans le cas des SEM par exemple.

Il existe peu de cadre légal et réglementaire spécifique aux SCIC et collectivités, c’est pourquoi on se base par analogie sur le cadre légal et réglementaire des associations et des SEM. Il n’y a pas non plus de jurisprudence, car le statut est encore relativement jeune mais il y a peu de contentieux.

Le statut SCIC encadre l’impossible redistribution des subventions. La  Loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération Article 19 nonies, al.3 précise "Les subventions, encouragements et autres moyens financiers versés à la société par les collectivités publiques, leurs groupements et les associations ne sont pas pris en compte pour le calcul de l'intérêt versé aux parts sociales"

A noter que dans la plupart des SCIC dont une collectivité est au capital, il est statutairement inscrit que 100% du résultat est versé en réserve impartageable.

Le conseil départemental du Val de Marne est au capital de la SCIC Coop bio Ile-de-France et a voté une subvention d’investissement à cette SCIC pour construire une légumerie. Le département a également quelques marchés d'approvisionnement alimentaires avec cette SCIC. Idem concernant la SCIC Paris soleil dont est sociétaire le CD du Val-de-Marne : subvention au démarrage et subvention de fonctionnement à cette SCIC.

 

Quels sont les risques encourus pour la collectivité ?

Le risque financier pour la collectivité est limité à hauteur de l’apport investi.

La responsabilité éventuelle dépend de l’engagement de la collectivité. L’Urscop recommande aux collectivités d'intégrer un organe non exécutif tel le conseil de surveillance par exemple.

Quand la Banque des territoires intervient au capital, elle fait un investissement minime pour siéger à la gouvernance, au CA, ou au conseil de surveillance et couple cela à un outil de quasi fonds propres. Le conseil départemental du Val de Marne siège au CA de Coop Bio IDF, où il représente le collège des collectivités. 

 

Au delà des risques encourus, il est important de prendre en compte la gouvernance coopérative : le gérant y a une responsabilité sociale forte. Et il s’agit d’une gouvernance multi partenariale, donc la collectivité va prendre sa place dans ce cadre : ni plus ni moins.

NB : il existe des assurances pour supprimer le risque civil des personnes qui siègent au CA ou dans un organe de gouvernance. 

 

Les SCIC et les aides d’Etat :

Les SCIC sont soumises aux mêmes règles dites des aides d’Etats que n’importe quelle entreprise. A noter cependant que l’apport au capital ne rentre pas dans l’assiette des minimis.

Depuis 2015, la Banque des territoires a élargi sa palette de financements aux SCIC : outils d’apport en fonds propre et quasi fonds propres. Quand la Banque des territoires intervient au capital, elle fait un investissement minime pour siéger à la gouvernance, au CA, ou au conseil de surveillance et couple cela à un outil de quasi fonds propres, tel qu'un prêt subordonné à intérêt participatif qui a un effet levier et facilite l’accès à un prêt bancaire. La Banque des territoires se positionne en investisseur de long terme sur minimum 7 ans avec attente de rendement : perception d’un intérêt ou d’une commission qui permet d’équilibrer la participation au capital et en quasi fonds propres.

 

Pour Philippe Maingault, participer à la vie d’une SCIC permet de comprendre un secteur économique. Sur les questions agricoles, grâce à sa participation au sein de la SCIC Coop Bio IDF, le conseil départemental est en contact avec des producteurs et comprends les contraintes environnementales, de production, ... cela leur permet d’être plus opérationnel sur le métier. Il y a aussi des retombées économiques qui peuvent être mesurées. C’est aussi le cas pour la SCIC Paris Soleil, qui permet notamment que la valeur reste sur le territoire. 

Le taux de mortalité des SCIC est beaucoup plus faible que celui des autres entreprises, car la SCIC s’appuie davantage sur les ressources du territoire, s’appuie sur plus de coopérations et est donc plus agile. Il est important de promouvoir ce statut. Et se rappeler que les risques juridiques sont davantage identifiés qu’ils ne se posent réellement.

 

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